Jacques Rancière : Communisme et consolation
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 Published On Premiered Sep 23, 2024

Tchekhov plutôt que Lénine. Voilà ce que nous propose gaiement Jacques Rancière dans Au loin la liberté (éditions La Fabrique), de la même façon que Joseph Jacotot répandait, dans Le maître ignorant, la bonne nouvelle de l’égalité des intelligences. Dans ce nouvel ouvrage cependant, il n’est pas question d’égalité, mais de liberté ; et il n’est pas question des rêves d’un philosophe, mais de ceux que met en scène un écrivain russe qui peut-être n’évoquera de prime abord pas grand-chose (sauf de s’être vaguement, une fois ou deux, ennuyé.e devant La Mouette).

Les nouvelles de Tchekhov offrent pourtant matière à parler d’émancipation, de révolution, de communisme : ce que fait Rancière une nouvelle fois, infatigable. Il serait faux néanmoins de considérer ces récits comme une simple « matière » ; en réalité, c’est comme si un dialogue se tissait entre l’auteur de la Nuit des prolétaires, et celui du Récit d’un inconnu, un dialogue se déployant à partir du « sentiment d’une ouverture indécise du temps ». Ce temps est avant tout celui de la servitude, celui de l’ordre de la police et des vies brisées où tant bien que mal, dans un horizon aux contours un peu flous, se dessinent des brèches.
On a donc lu et parlé sur la servitude et de liberté, sur la puissance de consolation qui sommeille dans l’ordinaire des petites histoires issues de la mélancolie « ironique et rieuse » de Tchekhov. Est-ce que la consolation mène à l’inaction ? « Changer les manières de sentir », à quoi ça sert ? On a peut-être eu l’impression d’entendre une adresse amicale aux révolutionnaires : vous, qui vous demandez « que faire ? » : ne devenez pas Trotskystes, ne figez pas sociologiquement la servitude, croyez toujours que les pas de côté sont possibles, sachez admirer les banales émancipations qui à coup sûr mènent ailleurs et par-delà, au sens radical du terme.
La liberté est loin, mais comme les vies enfin délivrées de ce qui les mutile, elle est au loin.

00:00 Introduction
02:10 De l'idée de l'égalité à la question de la liberté et de la servitude
2:52 L'égalité comme principe et pratique, la liberté comme forme de vie
5:33 La liberté chez Tchekhov
6:39 La servitude comme manière de continuer à vivre comme on vit
7:38 Politique de la littérature - la place de Tchekhov dans le livre
8:52 : Le progrès, le chaos et l'ingénieur (Lueurs)
10:27 L'étudiant révolutionnaire, le fils de serf devenu capitaliste et l'avenir du travail (La cerisaie)
11:55 « Il n'y a pas d'autres raison à la servitude que la servitude elle-même » : comment révolutionner les affects ?
13:38 Tchekhov VS Lénine
16:32 Quelles sont les conditions de possibilité d'une vie libre ?
18:05 Le présupposé de l'égalité et l'appel de la liberté
25:39 Contre le temps dominant et la nécessité historique : la liberté comme surgissement
29:17 Croire en la possibilité de toujours et à chaque instant recommencer : l'ouverture du temps
32:07 Substituer à la figure révolutionnaire de l'ouvrier celle de la naïveté amoureuse ?
40:49 Comprendre politiquement l'expérience sensible
41:41 La catastrophe écologique n'oblige-t-elle pas à accepter le temps dominant et ses fins inéluctables ?
47:27 Quels bribes et éclats de communisme aujourd'hui ?
51:00 Peut-on se contenter des « petites victoires » ?
53:11 Ressentiment militant, communisme et consolation
49:40 La force de l'extrême-droite c'est essentiellement le ressentiment
1:00:39 Le rancièrisme est-il un quiétisme ?

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